Doc. : la gouvernance mondiale

mardi 16 août 2016
par  Julien Daget
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Consigne : vous montrerez les enjeux et les limites de la gouvernance mondiale.
NB : ce texte est trop long pour une épreuve d’analyse de doc au bac.
Méthode : l’analyse de doc(s)


La place de l’OMC dans la gouvernance mondiale

Avons nous besoin d’humaniser la mondialisation ? Devrions nous le faire ? Pourquoi nous posons nous cette question ? Selon moi, de plus en plus de gens nous demandent d’« humaniser » la mondialisation en raison des effets négatifs perçus qu’elle a sur certaines personnes. Nous devons effectivement nous préoccuper des effets de la mondialisation sur les individus. En ce sens, je partage pleinement l’avis de Ricardo Lagos1, selon lequel « les êtres humains doivent être au centre du monde que nous édifions, un monde qui doit être capable non seulement de penser, de créer, de raisonner et de rêver, mais aussi de dialoguer ».

Qu’est-ce que la mondialisation ?
La mondialisation peut être définie comme une phase historique d’expansion accélérée du capitalisme de marché analogue à celle que l’on a connue au XIXe siècle lors de la révolution industrielle. Il s’agit d’une transformation fondamentale des sociétés liée à la récente révolution technologique qui a entraîné une recomposition des forces économiques et sociales à une nouvelle échelle territoriale.

Nous pouvons dire aujourd’hui que la mondialisation et l’ouverture accrue des marchés ont eu des effets très positifs et quelques conséquences négatives. […]
Toutefois, le caractère mondial de certains phénomènes préoccupants, tels que la rareté des ressources énergétiques, la détérioration de l’environnement et les catastrophes naturelles (comme récemment le cyclone Katrina et le tsunami en Asie), la propagation de pandémies (SIDA, grippe aviaire), l’interdépendance croissante des économies et des marchés financiers, la complexité de l’analyse et des prévisions et le manque de prévisibilité qui en résultent (crise financière) ainsi que les mouvements migratoires provoqués par l’insécurité, la pauvreté ou l’instabilité politique sont également des produits de la mondialisation.

Certes, on peut dire que dans certains cas, la mondialisation a renforcé les forts et affaibli les faibles.

C’est à ce double aspect de la mondialisation que nous devons chercher à remédier si nous voulons « humaniser la mondialisation ». À cette fin, nous devons « réformer la mondialisation » en cherchant clairement à stimuler le développement social, économique et écologique de l’humanité. Cela est conforme aussi aux objectifs de développement du millénaire2, qui peuvent être atteints moyennant une « réforme de la mondialisation de l’intérieur et pour le développement ».

Nul ne contesterait le fait qu’il y a un décalage croissant entre les problèmes mondiaux et les manières traditionnelles de chercher des solutions, nos institutions traditionnelles. L’une des conséquences les plus frappantes de ce décalage — le sentiment d’impuissance individuelle et les contraintes politiques des gouvernements — a deux effets : premièrement, elle influe sur la confiance dans le système national de gouvernance et deuxièmement, elle anéantit tout espoir de pouvoir influencer l’avenir. L’avenir devient un sujet d’anxiété parce que les citoyens ne sont pas convaincus qu’il y a un pilote dans l’avion.

Nous avons besoin de plus de gouvernance mondiale
Ce n’est pas la mondialisation qui crée ce sentiment d’anxiété, c’est l’absence de moyens pour y faire face de manière appropriée. Autrement dit, c’est l’absence de gouvernance au niveau mondial qui pose problème. Les nouvelles questions soulevées par les crises mondiales et par certaines évolutions politiques nous obligent à envisager de nouvelles formes de gouvernance. Pour faire face, au niveau approprié, aux questions, aux problèmes, aux menaces et aux craintes qui se manifestent de par le monde, nous avons besoin d’une plus large gouvernance mondiale qui tienne compte des nouveaux défis mondiaux.

Dans le même temps, il faut humaniser la mondialisation : si, bien souvent, les solutions doivent être mondiales, il faut aussi s’attaquer aux effets négatifs sur les individus et les sociétés. Humaniser la mondialisation signifie que nous devons nous occuper de ses victimes. À cette fin, il faut trouver des solutions mondiales pour remédier aux effets négatifs de la mondialisation à tous les niveaux — individuel, communautaire et universel.

Je voudrais faire aujourd’hui deux remarques :
1. la réforme de la mondialisation implique le renforcement de la « gouvernance mondiale » ;
2. l’exemple du commerce international met en lumière à la fois les possibilités et les difficultés inhérentes à cette gouvernance.

Qu’est-ce que la gouvernance mondiale ?
Pour moi, la gouvernance mondiale désigne le système qui permet à la société d’atteindre son objectif commun de manière durable, c’est-à-dire dans l’équité et la justice. L’interdépendance signifie que nos lois, nos normes et valeurs sociales et les autres mécanismes façonnant le comportement humain — la famille, l’éducation, la culture, la religion pour n’en citer que quelques-uns — doivent être analysés, compris et articulés de la manière la plus cohérente possible afin d’assurer un développement durable collectif et effectif. […]

L’OMC est un petit système de gouvernance dans lequel quelques éléments sont déjà en place : nous avons un système multilatéral qui reconnaît différentes valeurs, notamment un consensus sur les avantages résultant de l’ouverture des marchés mais aussi d’autres valeurs comme la nécessité de respecter la religion ou le droit de protéger l’environnement, et il est maintenant clairement admis que les valeurs non commerciales peuvent l’emporter sur les considérations commerciales dans certaines circonstances. Nous avons un système fondé sur l’État et le gouvernement, mais qui a pu s’adapter pour tenir compte des nouveaux acteurs sur la scène internationale ; enfin, nous avons un système qui dispose d’un mécanisme puissant pour le règlement des différends.

Mais le système commercial international et l’OMC sont loin d’être parfaits et beaucoup de choses pourraient être améliorées. Pour que l’ouverture des marchés procure des avantages réels dans la vie quotidienne dans les pays concernés, nous avons besoin de règles qui garantissent l’égalité des chances, qui assurent le renforcement des capacités et qui permettent aux Membres d’améliorer leur gouvernance interne.
C’est en partie à l’OMC qu’il incombe de relever ce défi ; mais le rôle essentiel de l’OMC, c’est l’ouverture du commerce ; l’OMC n’a pas la capacité institutionnelle de formuler et diriger des stratégies de développement. La tâche d’humaniser la mondialisation fait nécessairement intervenir d’autres acteurs sur la scène internationale : le FMI, la Banque mondiale et la famille des Nations unies.

Conclusion
[…] La mondialisation suppose une coopération internationale. Nous ne pouvons réussir que si nous voulons vivre ensemble et si nous sommes prêts à travailler ensemble. Nous devons investir dans la coopération internationale. Cette coopération exige une volonté et une énergie politiques et suppose que l’on accepte de discuter de ses avantages et de ses coûts. […]

Pascal Lamy [1], Humaniser la mondialisation, allocution à Santiago du Chili, 30 janvier 2006.
https://www.wto.org/french/news_f/sppl_f/sppl16_f.htm


[1Pascal Lamy est le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce de septembre 2005 à août 2013.